
Le Québec, et particulièrement Montréal, s’est imposé comme l’un des épicentres mondiaux de l’intelligence artificielle (IA). Cette réputation s’appuie sur un écosystème unique combinant recherche académique de pointe, initiatives industrielles ambitieuses et investissements publics et privés massifs.
Au cœur de ce réseau, Mila – l’Institut québécois d’intelligence artificielle – dirigé par Yoshua Bengio, pionnier du deep learning et lauréat du prix Turing 2018, incarne l’excellence scientifique tout en portant un message fort sur les enjeux éthiques.
Des institutions comme Polytechnique Montréal, l’Université Laval, l’UdeM et McGill forment la prochaine génération de spécialistes, tandis que Scale AI et IVADO jouent un rôle moteur dans le transfert vers l’industrie.
Une main-d’œuvre hautement qualifiée
Le Québec peut compter sur environ 45 000 professionnels en IA et 230 000 dans le secteur des technologies de l’information.
À Montréal, on recense 43 programmes postsecondaires intégrant l’IA, majoritairement universitaires, ainsi que 11 universités à travers la province proposant des cursus spécialisés. Cette formation est complétée par une immigration ciblée de talents étrangers.
Investissements et projets structurants
En juillet 2025, Scale AI a annoncé 98,6 millions $ pour soutenir 23 projets visant à accroître la productivité dans des secteurs variés :
Optimisation de réseaux ferroviaires (Rio Tinto)
Prévision de la demande (Transcontinental)
Planification d’entretien aéronautique (Avianor)
Ces projets s’inscrivent dans une stratégie de financement mixte public/privé à hauteur de 2 $ privés pour 1 $ public.
En parallèle, le gouvernement québécois a injecté 11 millions $ pour connecter les acteurs et accélérer l’industrialisation de l’IA.
Nouveaux acteurs et innovations locales
L’écosystème voit émerger des entreprises créatives :
Motiocreate AI (Baie-Saint-Paul), lancée en août 2025 par un entrepreneur de 15 ans, permet de générer automatiquement des vidéos verticales (Reels, TikTok) avec voix IA, sous-titres dynamiques et miniatures.
Dataperformers (Montréal) développe des solutions IA dans la finance et l’ingénierie, avec un rayonnement international.
Des initiatives comme PARTENAR-IA – alliance entre IVADO et les Regroupements sectoriels de recherche industrielle (RSRI) – visent à accélérer l’adoption responsable de l’IA.
Un secteur santé en transformation
Santé Québec prépare un projet pilote pour 2026 : déploiement d’IA certifiées (Plume IA, CoeurWay) pour la transcription de notes médicales, permettant de gagner 1 à 2 heures par jour par médecin.
Environ 2 000 licences seront attribuées dès la première phase.
Par ailleurs, des agents conversationnels comme Theor-E sont explorés pour le soutien psychologique, tandis que certaines études alertent sur les risques d’une dépendance excessive aux outils IA dans le diagnostic.
Événements majeurs et rayonnement international
Le Québec attire des événements phares :
ALL IN 2025 (Montréal, septembre) : +4 000 experts, conférences de Yoshua Bengio et Sasha Luccioni.
Rendez-vous IA Québec (Québec, novembre) : rencontres industrielles et académiques.
IJCAI 2025 (Montréal, août) : congrès international de recherche en IA.
World Summit AI Americas (Montréal, avril) : vitrine continentale des avancées.
Enjeux éthiques et politiques
L’IA pourrait automatiser jusqu’à 18 % des emplois au Québec (≈ 810 000 postes), principalement dans la vente, les services et l’administration.
Le Conseil de l’innovation du Québec milite pour une loi provinciale encadrant l’IA, afin d’éviter les lacunes de la législation fédérale et d’imposer des standards responsables.
Des secteurs créatifs, comme le doublage, se mobilisent : l’Union des artistes a interdit l’usage des voix enregistrées pour entraîner des IA.
Investissements étrangers et perspectives
Depuis 2018, Montréal a accueilli 1,7 milliard $ d’investissements directs étrangers dans le secteur de l’IA.
Les priorités à court terme incluent :
Renforcement de la cybersécurité, particulièrement en santé.
Développement d’agents intelligents plus autonomes.
Internationalisation via des partenariats (France, Émirats arabes unis).
Conclusion
Porté par une main-d’œuvre qualifiée, des centres de recherche d’envergure et des politiques publiques proactives, le Québec consolide sa place parmi les leaders mondiaux de l’intelligence artificielle.
Mais ce leadership s’accompagne de responsabilités : garantir une adoption éthique, protéger l’emploi et anticiper les risques sociétaux.
L’année 2025 marque une étape décisive : entre innovations locales, investissements massifs et débats éthiques, le Québec écrit un chapitre stratégique de l’histoire de l’IA.